Camping – partie 1

La créature du lac m’avait laissé dans un état pitoyable : les multiples tentacules avaient laissé de nombreuses traces rondes de morsure ponctuée de traces de dents sur tout mon côté gauche, bras, jambe, flanc, tout…

Je saignais abondamment en atteignant finalement la berge et c’est plongé dans un brouillard de douleur et d’adrénaline que je remontais un des ruisseaux. Tout mon être qui n’était pas occupé à avoir mal poussait mon corps à s’éloigner le plus possible de ce monstre, du moins jusqu’à ce que la douleur et l’épuisement l’emportent et je m’effondrais dans le ruisseau, vidé…

C’est un miracle que je ne me sois pas noyé dans ce cours d’eau cette nuit-là. Quand j’émergeais, à la fois de mon inconscience et du court d’eau, j’étais en piteux état…

Mais je pris également conscience d’un danger bien plus insidieux…

Ce que j’avais cru être de la simple vase s’avérait être une sorte de moisissure à croissance rapide : à chaque fois que je frottais pour la retirer, je la voyais reprendre du terrain petit à petit.

Le pire restait que là où le monstre m’avait accroché, la vase était rentrée dans ma plaie, lui donnant un aspect odieux qui m’élançais à chaque mouvement, des taches noires s’étendaient sous ma peau en suivant les veines. Je sentais mon corps lutter contre cette intrusion et ma fièvre monter petit à petit.

Je me lavais frénétiquement, raclant, grattant et frottant tout mon corps. L’espèce de vase collait horriblement et entre la fatigue et la nuit qui tombait, je devenais de plus en plus frénétique, allant parfois jusqu’au sang.

Certes, ce n’était pas la chose la plus intelligente à faire mais à ce moment précis, je n’avais qu’une idée en tête : Me débarrasser de la vase.

 Au prix de nombreuses écorchures, j’avais réussi à retirer la plus grande partie de cette moisissure. La nuit était tombée depuis longtemps et je passait une des pires nuits depuis l’éveil. Entre faim, épuisement, fièvre, démangeaisons, et humidité, chaque bruit devenait une menace, chaque bruissement était un tentacule remontant le cours d’eau pour m’emporter, chaque poussée de fièvre me faisant voir mes membres se raidir jusqu’à ce que j’en meurt.

Une part de moi souhaitais que ce calvaire cesse, voyant la mort comme une délivrance, mais l’idée de pouvoir peut être un jour rentrer chez moi me permit de tenir. C’était comme une torche au loin dans la nuit. Une petite étoile d’espoir qui donnait un point de repère, un objectif à atteindre et surtout une raison de se battre.

Au matin, j’était une loque. Quand je n’étais pas couvert de boue, j’était couvert de sang et autres fluides. Mais il me semblait avoir gagné la première bataille contre cette vase : Sous ma peau, j’avais l’impression qu’elle avait comme séchée et m’avait laissé des espèces de tâche qui ressemblait à des marbrures, presque rigides et d’un gris-vert répugnant.

Je buvais un peu d’eau fraiche, me débarbouillais puis me mit en quête de nourriture, encore une fois je trouvais de ces poires jaune-orange. Et ce n’est que le ventre plein que je me rendis compte que j’avais perdu les bourses de cuir et leur contenu.

Je me rendis compte à quel point ces objets pourtant simples et surtout d’un usage inconnu comptaient pour moi. Cela peut sembler étrange, mais je sentais comme un attachement à ces objets que j’attribuait au fait que l’une des bourses était la seule chose qui m’avait été « donnée » lors de l’éveil et l’autre la seule preuve que j’avais de ne pas être simplement seul sur ce monde.

Ayant énormément de mal à marcher, je restais une bonne partie de la journée sous l’arbre a poire et si un prédateur devait me dévorer, tant pis. Au bout que quelques heures, je m’ennuyais ferme et les seuls animaux qui s’étaient approchés avaient fuis à ma vue.

Aussi décidais-je de faire du feu. Au mieux cela fonctionnait, au pire j’avais perdu mon après-midi. J’avais une vague notion de comment procéder mais il me fallut tout de même de nombreuses tentatives avant de produire quelques braises assez stables pour le bois sec prenne véritablement.

A la nuit tombée mes mains étaient rouges et pleines d’échardes mais la chaleur et surtout la lumière du feu étaient une assez belle récompense pour compenser la douleur.

J’entassait le bois mort pour que le feu passe la nuit puis je m’endormais, épuisé et fiévreux.

Après m’être réveillé, je ravivais le feu et tentais de faire cuir une des poires, ce qui fut une totale réussite ! Non seulement la chaire devint liquide et sucrée, mais en plus la peau se rigidifiât et se transforma en parfaite gourde.

Bien sûr, au moment, la joie de cette découverte passa un peu au second plan puisque mes plaies me faisaient atrocement souffrir et d’intenses démangeaisons régnaient là où ma peau n’était pas (encore) à vif.

Comme on dit, une découverte ne viens jamais seule, et c’est en tentant de me lever que je découvrir avec horreur que les taches de moisissures avaient continué de progresser, je m’imaginais déjà perdant jour après jour de la mobilité, l’engourdissement des doigts, la difficulté à respirer quand elle aurait atteint les poumons, et si mon instinct ne me trompait pas, cela finirait par atteindre le cœur et le figer pour de bon. Gagner par la panique je prenais une décision radicale : Passer une buche en braise au-dessus des marbrures dues à la vase.

Eh bien laissez-moi vous dire que cela fait un mal de chien.

Heureusement, la moisissure supportât encore moins bien la chaleur et en quelques heures à peine les démangeaisons atroces que je subissais depuis ma sortie du lac cessèrent, la progression des marbrures noires s’arrêta et au milieu de la journée, prirent une teinte grisâtre.

Je continuais de me reposer, espérant récupérer de mes blessures je passais une nouvelle journée à ne rien faire d’autre que me reposer, manger et dormir d’un sommeil enfiévré.

Ce qui me laissait assez de temps pour réfléchir. Je tentais de garder les idées noires de côté, me concentrant sur ce que je pouvais faire. Le plus simple était de commencer par aller récupère mes bourses près du lac, à partir de là j’aurais au moins de quoi transporter un fruit ou deux. Ça ne serait pas grand-chose mais bon…

Me refaire un pagne et des sandales ne seraient pas tellement plus compliqué, ce qui me posait le plus problème était ma fièvre. Tant que je n’allais pas mieux gravir les flancs de la montagne était hors de question. Bien que la part la plus pessimiste de mon cerveau se disait que quitte à mourir, autant le faire à fond, la part la plus optimiste se disait que ça serait une bonne idée de se reposer et récupérer d’abord, ou, à la rigueur, faire quelques kilomètres pour s’éloigné du lac puis faire une étape avant de monter plus haut.

Pour le moment j’avais l’impression que ma fièvre tombait peu à peu, ou que je la remarquais moins, je me prenais donc à espérer que mon plan eut fonctionné. Avant que le soleil ne se couche je me forçais à faire un aller-retour à la rivière pour nettoyer mes plaies puis me laissait emporter par l’épuisement dans un sommeil sans rêve.

C ‘est avec surprise que je m’éveillais relativement en forme. « En forme » est évidemment à replacer dans le contexte de quelqu’un s’attendait à se réveiller fourbus, épuisé et fiévreux. Je dois bien avouer que j’étais certes épuisé, aussi bien physiquement que mentalement, mais j’étais clairement en meilleurs forme que ce à quoi je m’attendais.

Je ravivais mon feu qui avait survécut par miracle a la nuit, vu que j’avais oublié de l’alimenter en bois avant de dormir, puis mangeait autant que possible de ces poires cuites. Enfin, juste avant de me mettre en route, je réfléchissais à un plan avant de me rendre compte que je n’en savais simplement pas assez pour en établir un fiable, je décidais donc que j’allais commencer par observer.

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